

Deux portraits fort différents en couverture de ce nouveau livre de Bernhard Schlink. Je l’ai lu en allemand (livre acheté récemment en Allemagne ou j’étais pour un enterrement). Les regards des filles sont différents: effrontée dans la version française – presque romantique dans la version chez Diogenes (le peintre anglais (Sir) Georg Clausen 1852 – 1944 était « spécialiste » de ces portraits de femmes entre réalisme et impressionnisme).
La version français a été traduite par Bernard Lortholary. Elle sera certainement fidèle et bonne (il a traduit je pense TOUS les livres de Schlink) – et je vais l’offrir autour de moi, puisque cette lecture (émouvante) vaut la peine.
Présentation de l’Editeur (frç) Gallimard – la 4e de couv’ allemande est plus avare en « dévoilement »
À la mort de son épouse Birgit, Kaspar découvre un pan de sa vie qu’il avait toujours ignoré : avant de quitter la RDA pour passer à l’Ouest en 1965, Birgit avait abandonné un bébé à la naissance.
Intrigué, Kaspar ferme sa librairie à Berlin et part à la recherche de cette belle-fille inconnue. Son enquête le conduit jusqu’à Svenja, qui mène une tout autre vie que lui : restée en Allemagne de l’Est, elle a épousé un néo-nazi et élevé dans cette doctrine une fille nommée Sigrun.
Kaspar serait prêt à voir en elles les membres d’une nouvelle famille. Mais leurs différences idéologiques font obstacle : comment comprendre qu’une adolescente, par ailleurs intelligente, puisse soutenir des théories complotistes et racistes ? Comment l’amour peut-il naître dans ce climat de méfiance et de haine ?
Cette rencontre contrariée entre un grand-père et sa petite-fille nous entraîne dans un passionnant voyage politique à travers l’histoire et les territoires allemands. Plus de vingt-cinq ans après Le liseur, Bernhard Schlink offre de nouveau un grand roman sur l’Allemagne qui sonde puissamment la place du passé dans le présent, et nous interroge sur ce qui peut unir ou séparer les êtres.
Kaspar, libraire, venant de la bourgeoisie cultivée (il est un peu dans le monde du 19e siècle, aime la musique – Bach, Mozart etc..), a en 1964 rencontré sa future femme Birgit à Berlin-Est et a tout fait pour qu’elle puisse fuir le pays. Plus de 40 ans après sa femme devenue alcoolique vient de mourir (accident/suicide ?), et il va apprendre des choses sur elle qu’il a ignoré. Il découvre les écrits de sa femme (Birgit) et l’existence d’une fille laissée en RDA – un choc tsunamiesque pour lui. Sa mission : aller à la recherche et la rencontre de cette fille. Et il va rencontrer « sa » petite fille.
Celle-ci va passer (après des négociations avec les parents) deux fois par an des vacances chez lui. Et c’est ce face-à-face qui est touchant et révélateur. Choc de cultures, d’idées, de conceptions du monde… Grand décalage (politique et social) entre les deux mondes de la jeune de 14 ans qui arrive pour la 1ere fois à Berlin et découvre la ville, la musique (le piano), les musées et le « vieux » de 70 ans qui vit un peu dans sa bulle intellectuelle et est empreint du rigorisme protestant rhénan. Interrogations, tâtonnement… Lui venant de cette bourgeoisie cultivée face à cette fille (et sa famille) qui est ancrée dans le rêve d’une Grande Allemagne, la haine des étrangers, des juifs… se demande comment transmettre sans imposer. La tension et les interrogations de ce Kaspar je les sens (moi bientôt quadruple-grand-père) également (heureusement pas face à un décalage socio-politique aussi énorme.

Je ne dis rien de plus que la 4e de couv’. Il faut lire le cheminement, les doutes, les abîmes, les côtés obscurs de notre société (allemande). C’est comme toujours écrit dans une langue « corsetée » un peu vieillotte (la littérature du 19e plus les poèmes de Mörike, Claudius, Hebbel – qui ont peuplés ma vie de lycéen – ont un poids énorme dans la vie de Kaspar. Toutefois la langue est d’une précision au scalpel (n’oublions pas que Schlink était juriste avant d’écrire) avec toutefois un zeste de mélancolie (mal-)heureuse.
Un regard sur l’Allemagne d’aujourd’hui (et la difficulté de la réunification des deux Allemagnes) formidablement documenté. Pleine de tristesse sous-jacente mais aussi d’espoir. Un très grand livre ! Qui de plus vous fait découvrir, si vous êtes curieux de beaux morceaux de musique classique (sonates de piano).
Ping : La petite-fille, Bernhard Schlink – Pamolico – critiques romans, cinéma, séries
Ping : Bernhard Schlink – La Petite-fille | Sin City
Merci pour le lien.
J’aimeJ’aime