Je propose pour ce dernier livre de Bernhard Schlink pas encore traduit – mais certainement en cours d’être traduit) le titre français : Automne de la vie (le terme allemand veut dire qqchose comme : « Couleurs du départ« )
9 nouvelles – Erzählungen – sous le signe d’hommes d’un certain âge (Schlink a lui-même 76 ans aujourd’hui) qui suite à certains événements (parfois minuscules) se confrontent à leur passé, à leurs erreurs et/ou omissions (coupables ou non). Ce qui crée une ambivalence (comme un fil rouge) – chaque acte a ses conséquences (est-on toutefois toujours « coupable » ?
Les nouvelles parlent de la réussite et/ou l’échec d’un amour, de trahisons, du manque de confiance, des souvenirs qui entrent comme par infraction dans une vie auparavant et en surface calme d’une vie rangée.
Ainsi « Künstliche Intelligenz » (« Intelligence artificielle ») met en scène un mathématicien qui essaie de se justifier pour avoir trahi la fuite prévue (vers la RFA) de son meilleur ami (et employé) à la Stasi (à l’époque de la RDA). Considéré objectivement, c’était une trahison, mais du point de vue d’aujourd’hui, l’échec de la fuite a permis à son ami de vivre un mariage extrêmement heureux, ce qui ne lui serait probablement jamais arrivé à l’Ouest, ce qui transforme (aux yeux du narrateur) sa trahison en un service d’ami. Et – ce qui est d’importance : l’homme a pu « garder » l’ami près de lui.
Dans la nouvelle « Geschwistermusik » (« musique de chambre exécuté par deux frères et soeurs »), un musicologue revoit par hasard deux personnes qui ont eu une très grande influence dans sa jeunesse : une fille issue d’une famille riche et son frère handicapé. Il y a des décennies, le narrateur (pas de la même « classe sociale » se sentait « instrumentalisé » et a peut-être raté un amour (d’enfance).
Une autre nouvelle traite (in-)directement (doucement mais surement) d’un tabou (l’inceste) et déclenche la question à savoir si on peut après ces faits continuer à vivre « normalement » comme si rien ne s’était passé ?
Une autre décrit les vacances d’été qu’un garçon passe au bord de la mer avec sa mèr, le père restant à la maison. Il décrit avec des mots sensibles comment le garçon va découvrir une « autre » mère, à savoir la femme derrière la mère ou l’image qu’il s’en était fait d’elle, tout en se découvrant lui-même.
Ecrit dans un allemand « classique », sobre, fluide (toujours les termes qu’il faut, avec un petit aura désuet (la langue parfois criarde, d’aujourd’hui, ancrée dans le 21e siècle n’est pas pour lui). Et il n’a pas besoin d’effets de style. Ça avance calmement et devient ainsi de tout repos. De plus, Berhard Schlink glisse toujours des réflexions quasi-philosophiques dans ces nouvelles, sans les alourdir ou complexifier outre-mesure.
Indéniablement une oeuvre de maturité (« Alterswerk« ) profondément humaine.
D’autres livres de Bernhard Schlink que j’ai lu : Olga, La femme qui descend de l’escalier, Mensonges d’été – toutefois, je pense que « Le liseur » est (et restera la meilleure oeuvre de lui).
Les illustrations sont de Mary Jane Ansell.
Superbe présentation d’un livre – non encore traduit en français. Je découvre l’auteur mais il me faudra attendre la version française.
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