On ne se baigne pas dans la Loire

« Comment lutter, l’énergie irrépressible d’une dizaine d’ados. De la rive, Benoît contemple ses baigneurs droit sortis d’un tableau de Bazille. Leurs corps qui s’ébrouent. La vie. » 

L’article du Monde dans le Monde du Livre en date du 27.1.2023 m’avait tapé dans l’oeil – j’ai lu sur une tablette.

Guillaume Nail, présenté comme un traducteur/journaliste et comédien, auteur de livres pour la jeunesse (je n’avais encore rien lu de lui), vient de sortir un 1er roman pour adultes, mais dont le sujet sont des adolescents en colonie de vacances (encadré par des jeunes à peine plus âgés qu’eux.

On apprend à la fin du roman que le livre s’est inspiré du drame de Juigné-sur-Loire (en 1969) qui a couté la vie à dix-neuf (19 !!!) jeunes.

Sur tout juste 160 pages le roman se divise en trois parties : Le Courant (31 août), L’amont (30 août, soir – 31 août, matin), L’Estuaire (31 août, après-midi).

Dans la 1ere partie le narrateur nous présente Benoît (le dirlo – qui aime s’accaparer et sniffer les vêtements des jeunes, Totof (qui ne va pas se baigner et plutôt chercher un ballon dans le parc d’un « château » et y faire une découverte macabre) Gus, un garçon roublard et fanfaron, Pauline (la seule fille qui s’occupe de son père en même temps et est une sorte de « petite main » et enfin Pierre (un garçon complexé, souffre-douleur et marque par de mauvais souvenirs de sa 1ere colo à l’âge de 7 ans).

Nous sommes le dernier jour de la colo (et en 2e chapitre à la veille de cette dernière journée – par ailleurs, ce passage est un peu déconcertant au début, imprégné qu’on est par les faits de la dernière journée et le mode de pensée des protagonistes que le narrateur nous présente)….

Le style aussi est un peu déconcertant mais en phase avec le côté « fiévreux » des jeunes, parfois presque en mode « rap » ou « slam ». Le Monde le souligne bien dans son article :

https://www.lemonde.fr/livres/article/2023/01/25/on-ne-se-baigne-pas-dans-la-loire-de-guillaume-nail-ce-que-cachent-l-eau-calme-et-les-c-urs-troubles_6159316_3260.html?random=873414034

……ce qui rend ce roman si attachant et réussi, c’est avant tout sa langue. Déliée, vivante, précise et délicieusement inventive en même temps. Parfois d’un classicisme absolu pour dépeindre avec lyrisme la Loire, le fleuve qui prend ses aises, l’orage naissant et l’eau qui monte. Souvent chahutée, « hop zim boum », quand Pierre, Farid, Pavel et les autres s’aspergent, s’ébrouent, batifolent, qu’ils jonglent avec trois brugnons, que Gus « valdingue ses chaussures » avant qu’un autre personnage « barseille tout dans le fossé ». Comme les cailloux qu’ils lancent dans l’onde, les mots s’envolent, ricochent, atterrissent loin de là où l’on s’y attend. Le flot charrie soudain des bouts de chanson, du Daho, quelques expressions crues, d’énergiques « Yallah ! » et des ­néologismes qui glissent avec le reste : « Pierre, soudain, épiphane. »

J’ai d’ailleurs dû chercher parfois les mots dans l’internet – c’est en effet étonnant le mix du « parlé », du populaire ou argot à côté d’une belle langue ciselée et classique.

près de Blois – mai 2015

[yolo, nawak, calbute, glaviotte, wassingue, tuffeau, bandouille, loufer….. ]

Un roman qui sort du lot (standard) et je pense qu’il faudra garder à l’œil cet auteur.

Enfin à noter la belle « Playlist » de Guillaume Nail sur Spotify : https://open.spotify.com/playlist/0p5rJpxDb8YpoDLtXkhCmP https://open.spotify.com/user/guizgou

A propos lorenztradfin

Translator of french and english financial texts into german
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