Voilà un bon film français loin du film à thèses…. Polar, thriller sociologique, film d’enquête oui, mais avec un (même plusieurs) côté(s) en plus …. et je ne parle pas seulement d’une sensibilité à fleur de peau (des personnages ET du réalisateur – Dominique Moll avec son co-scénariste Gilles Marchand) qui vous colle à la peau en sortant de la salle. S’ajoute à cela un humanisme que je n’ai pas vu / ressenti au ciné depuis un petit moment.

Je ne dévoile quasiment rien en vous disant que dès le début du film (encart !) on apprend que l’enquête que le film s’apprêtera à montrer n’aura pas d’issue (le/la meurtrier/-ière d’une jeune femme, brûlée vive ne sera jamais trouvé/-e)…. Ce n’est pas, loin s’en faut, un cas isolé (les statistiques disent que sur 800 homicides/an en France 20% des crimes ne seront jamais élucidés – mais resteront gravé dans la tête des enquêteurs, les hanteront parfois même, jusqu’à leur mort).

Dominique Moll utilise le cadre normatif d’un policier-enquête, mais utilise p.ex. contrairement à Hitchcock discrètement la musique et n’essaie pas de rajouter la tension. Ses enquêteurs ne sont pas non plpus ni des Colombo, ni de Starsky & Hutch ou autres Miles Archer (avec un accolyte) sont des gars comme toi-et-moi, pas alcooliques, ni toxico ou au bout du rouleau quand l’enquête commence et ne se nourrissent pas de dialogues audiardesques, ils ne sont pas sadiques non plus, ou particulièrement méchants. Ils font leur boulot, c’est juste la charge bureaucratique peut-être qui pèse en plus (on dirait qu’ils se noient dans la paperasse), ou la photocopieuse qui n’imprime plus. Et parfois la déception face à l’humain interrogé, une répulsion aussi (« Quel crétin, celui-ci ! » suffit pour dire le dégoût à la sortie d’un interrogatoire d’un témoin, quand moi j’aurai eu tendance de leur donner une gifle – au moins).
Il y a par ailleurs peut-être un seul moment du film un peu « lourd ». Le spectateur que je suis avait bien compris que finalement tout homme et ex-amant de la fille assassinée aurait pu être le meurtrier. Mais de là à faire défiler les visages des témoins-suspects en surimpression sur le visage de l’enquêteur pour souligner, que ce sont les Hommes dans leur ensemble qui « ont tué la fille » (l’enquêteur compris) ….

La troupe d’acteurs est parfaite – avec mention spéciale à Bastion Bouillon et Bouli Lanners (les deux enquêteurs principaux). Pour Lanners je savais qu’il était épatant, B. Bouillon je ne l’ai pas encore vu – j’ai raté le dernier film de D. Moll « Seul les bêtes ». Une intensité dans le regard, un humour sec (hah – les conseils de l’un à l’autre de bien s’assoir sur le trône pour uriner) et un côté perdu, impuissant quand B. Lanners se dévoile pour dire ses problèmes de couple (sa femme veut divorcer, enceinte d’un autre) et ne reçoit qu’n regard, du muet impuissant….

Par ailleurs : le film se passe (en partie au moins) à Grenoble – avec des petites tricheries : le Palais de Justice montré est en réalité la Mairie …. (tzzz)
Last but not least – voici deux liens vers des articles qui m’ont donné envie de voir ce film (sans attendre la sortie sur l’étrange lucarne)…. Il attire finalement encore « pas mal de monde » – en 5e semaine d’exploitation à Grenoble.
Je remercie bien : Tour d’écran /Princecranoir et Newstrum de m’ouvrir les yeux sur des pans de cinéma que je ne connais pas trop – vous êtes formidables ! Et ce que vous écrivez – parfois avec des antennes et une sensibilité que je vous jalouse – est nettement plus étayé que mes bafouilles.
(Moi je n’ai pas ressenti le côté Lynchien – j’ai juste pensé un moment à « Zodiac » ….. Par contre, en effet : les scènes avec Anouk Grinberg (qu’on ne voit trop rarement), je signe absolument : « le ton décalé rappellent de manière troublante la regrettée Marie Trintignant« ).
Newstrum : https://newstrum.com/2022/08/05/la-nuit-du-12-de-dominik-moll-une-flamme-dans-la-nuit/
Prévu à mon programme, si je peux.
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Je ne pensais pas pouvoir….
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et… je vais voir, question de planning.
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« La Nuit du 12 » de Dominik Moll…
Il est des cinéastes dont on attend avec gourmandise la sortie de leur dernier film! On n’est jamais déçu, il y a toujours un scénario d’enfer et, à chaque fois, on se prépare à la dégustation. Dominik Moll appartient à cette catégorie. Il n’est que de citer ses derniers films: « Harry, un ami qui vous veut du bien » (C’est par celui-là que nous avions découvert le talent extraordinaire du cinéaste), « Lemming », « Seules les bêtes » (Peut-être le plus brillant!). « La Nuit du 12 » ne déroge pas à la règle. Il s’agit à nouveau d’un thriller jouissif, genre dans lequel le cinéaste excelle.
Un peu de frustration au départ, puisque, d’entrée de jeu, on sait qu’il s’agit d’une affaire qui n’a jamais été élucidée et qu’à la fin on n’aura pas le dénouement de l’énigme, avant de comprendre que l’intérêt du film n’est pas là! « La Nuit du 12 » nous présente en fait tout le déroulement de l’enquête judiciaire et cela permet au cinéaste d’aborder des thèmes qui lui sont chers. On a donc, face à nous, un polar psychologique, puisque nous est donnée à voir toute l’atmosphère qui règne dans ce groupe de la P. J., les déconnades qui permettent de surmonter les horreurs auxquelles les policiers sont confrontés, les relations pas toujours très amicales entre les enquêteurs, et puis aussi leur vie privée, qui interfère sur leur travail, le blues dépressif qui atteint certains d’entre eux, bref la vie normale d’un groupe de la P. J. Et cela nous donne une étude passionnante, probablement très réaliste, très vraie, les longues filatures, les planques au bout de la nuit et tous les dessous de l’enquête menée par des policiers brillants, qui ne se satisferont jamais de leur échec: ils resteront obsédés par cette absence de résultat. « La Nuit du 12 », on l’a déjà dit, est un polar psychologique, mais c’est aussi un film à résonance philosophique, qui va beaucoup plus loin que le simple thriller et qui nous livre de nombreuses réflexions sur la nature humaine en général. Les personnages, flics ou suspects, ont réellement une épaisseur, les seconds rôles sont parfaitement étudiés et c’est manifestement un plaisir pour les acteurs de camper de telles personnalités, d’autant que Dominik Moll s’est applique à réunir un casting haut de gamme, en premier lieu le toujours excellent Bouli Lanners et Bastien Bouillon, moins connu parce qu’abonné aux seconds rôles, mais qui ici assure le premier rôle avec un grand talent. Ajoutons Anouk Grinberg qu’à première vue je n’avais pas reconnue dans le rôle du juge d’instruction.
La photographie est très belle, dans une très belle région, le montage ménage le suspense, tout cela fait que voilà un film que l’on suit avec un très grand plaisir!
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Merci beaucoup pour le lien vers mon « trou d’écran » ;-), en espérant que seront nombreux les lecteurs à tomber dedans. 🙂
Merci aussi pour ces précisions de Grenoblois, à qui on ne la fait pas quand la mairie se change en palais de justice. Dire que je n’y ai vu que du feu serait d’un goût totalement déplacé.
En tout cas, un film hautement recommandable !
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Corrigé…..
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👍
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Bonjour Lorenztradfin, bravo pour ce billet sur un film qui pour moi est le meilleur film français de l’année pour l’instant. Son succès est mérité. Bonne journée.
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…Florian et Strum en parlent cependant mieux, plus approfondi… et je vais de ce pas voir aussi « As bestas » dont Florian parle si bien… Merci pour tes traces sur mon blog !
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