J’avais parié que ce livre serait sur la liste du Livre Inter 2022 et voulais prendre de l’avance – mais pas de chance (tzz), il a eu le Prix Interallié 2021, ce qui fait que j’ai acheté (et lu) – sans le vouloir à priori – 3 livres qui ont été couronnés par des Prix… moi qui voulais éviter ça….
.« En reprenant les dates, celles qui correspondent à ses cambriolages, celles de ses victoires sur la piste, j’ai l’impression de retracer le parcours d’un champion schizophrène : vainqueur le jour, voleur la nuit. C’est une forme de suicide, en fait. » (p. 147)
Toutefois je ne l’ai pas regretté – Les 424 pages se lisent vite, facilement.

Présentation de l’Editeur (L’iconoclaste)
L’énigme d’un homme, champion le jour, voyou la nuit. Un face-à-face exceptionnel entre l’auteur et son sujet.
De chaque côté du parloir de la prison, deux hommes se font face pendant deux ans, tous les mercredis. L’un, Mathieu Palain, est devenu journaliste et écrivain, alors qu’il rêvait d’une carrière de footballeur. L’autre, Toumany Coulibaly, cinquième d’une famille malienne de dix-huit enfants, est à la fois un athlète hors norme et un cambrioleur en série. Quelques heures après avoir décroché un titre de champion de France du 400 mètres, il a passé une cagoule pour s’attaquer à une boutique de téléphonie.
Au fil des mois, les deux jeunes trentenaires deviennent amis. Ils ont grandi dans la même banlieue sud de Paris. Ils auraient pu devenir camarades de classe ou complices de jeux. Mathieu tente d’éclaircir « l’énigme Coulibaly », sa double vie et son talent fracassé, en rencontrant des proches. Il rêve qu’il s’en sorte, qu’au bout de sa course, il se retrouve un destin.
Tout sonne vrai, juste et authentique dans ce livre. Mathieu Palain a posé ses tripes sur la table pour nous raconter ce face-à-face bouleversant. Quand la vraie vie devient de la grande littérature.
La révélation d’un auteur qui dépeint avec talent une France urbaine, ultra-réaliste et contemporaine.
En effet, le roman est parfaitement ancré dans la réalité contemporaine, une sorte de « journalisme littéraire », ou un (très) bon reportage avec un zeste d’introspection de la part de l’auteur, qui a le même âge que Toumany Coulibaly et vient du même quartier de la banlieue et dispose ainsi de pas mal de matière pour faire une introspection sur le conditionnement (ou non) par un quartier.
J’ai plus d’adrénaline quand les flics me courent après qu’en remportant un 400 mètres.
Mathieu Palain avait lu des articles sur ce garçon, devenu champion de France du 400m en salle en 2015 et condamné à une peine de prison de plusieurs années, parce qu’il était en dehors des pistes un cambrioleur récidiviste. Il lui a écrit une lettre, parce qu’il voulait le rencontrer, la réponse lui est venu un an plus tard. Pendant deux ans, quasiment chaque mercredi, Mathieu Palain va avoir droit au parloir avec Toumany. « On a parlé à cœur ouvert, il n’y avait aucun enjeu. J’étais juste curieux de son histoire. Et lui, je crois qu’il voulait se livrer à quelqu’un…Au début, j’étais un journaliste qui venait tous les mercredis pour soutenir un mec, sans en parler autour de moi. J’étais un soutien qui voulait cerner cette personnalité. » Et les deux deviennent d’une certaine manière des amis. Mathieu P. va faire de la matière de ce que lui raconte Tumany un roman-récit.
Les premiers deux chapitres (un, deux) retracent l’enfance (il a passé un certain temps au Mali), la jeunesse, la carrière sportive de Toumany – c’est alerte, bien écrit, fait souvent mouche. On a l’impression de lire une biographie documentée et entrainante pour Libération ou Le Nouvel Obs….
C’est dans le troisième chapitre qu’on comprend peu à peu pourquoi Mathieu Palain s’intéresse si fortement à ce coureur aux deux facettes, ce qui le lie à Toumany. L’enquête que le journaliste entreprend va le mettre en contact avec des psy, des entraineurs, l’entourage de Toumany. C’est le chapitre aussi qui parle le mieux de la situation dans les prisons françaises et contient des réflexions sur « l’enfermement ».

Et le lecteur est balloté un peu…. Mathieu P. instille tellement de sympathie pour le coureur-voleur à double personnalité qu’on a presque l’impression d’une injustice, d’un manque de compréhension de la justice…. vie mouvementée de Toumany Coulibaly et la dualité de sa personnalité. Compréhensible, l’auteur lui-même se lie de plus en plus d’amitié avec Toumany…. et c’est touchant, parfois même émouvant et passionnant en même temps.
De son côté, je crois que c’est là, en atteignant le très haut niveau, que Toumany a compris ce qu’essayait de lui expliquer Jean-Michel *: l’athlétisme est un sport de pauvres. Il n’y a pas d’argent là-dedans. Intégrer l’équipe de France ne transforme pas votre tacot en Ferrari, aucun gestionnaire de biens ne vous propose ses magouilles pour échapper au fisc, vous ne vous retrouvez pas le dimanche après-midi à distribuer des sourires sur le canapé de Michel Drucker. Toumany a beau courir vite, il reste un jeune fauché dans une cité de la banlieue sud. (p. 106 – * un entraineur)
Un livre qui sort un peu de la production littéraire lambda et offre de temps en temps (dans sa 3e partie) quelques moments d’émotions.
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