Il y a un an un roman m’avait scotché « Asta ». Dans ce roman, les bribes de mémoire d’un homme submergeaient le lecteur.
Là, c’est l’Editeur Gallmeister qui nous offre un texte qui, d’une certaine manière, joue avec la mémoire.
Résumé (4e de couv’)
Idaho, 1995. Par une chaude et insouciante journée d’août, Wade, Jenny et leurs deux petites filles, June et May, âgées de six et neuf ans, se rendent dans une clairière de montagne pour ramasser du bois. Se produit alors un drame inimaginable, qui détruit la famille à tout jamais. Neuf ans plus tard, Wade a refait sa vie avec Ann au milieu des paysages sauvages et âpres de l’Idaho. Mais tandis que la mémoire de son mari vacille, Ann devient peu à peu obsédée par le passé de Wade. Déterminée à comprendre cette famille qu’elle n’a jamais connue, elle s’efforce de reconstituer ce qui est arrivé à la première épouse de Wade et à leurs filles.
C’est donc Ann, qui est la gardienne de la mémoire de son mari (Wade) – remarié après un drame (la 1ere femme – Jenny – de Wade avait tué leur fille May et leur 2e fille (June) a subitement disparu).
« Elle a pris le passé de Wade et l’a étalé devant elle, faisant de son propre avenir un retour en arrière, alors même que ce passé disparaît. Ce lent effacement, cette ligne blanche traversant l’obscurité de la mémoire de Wade, voilà ce qu’Ann suivra toute sa vie durant. Et, à n’en pas douter, cela la mènera jusqu’aux portes de sa prison secrète ».
Étonnant roman (lu dans la version poche) traduit formidablement bien par Simon Baril dont le site de chez Gallmeister nous dit : « Ces dernières années, S. Baril a eu le bonheur de traduire des textes d’une grande variété, allant de la littérature jeunesse au polar, du grand classique au premier roman, de Melbourne à Londres en passant par l’Idaho. Il tient à cet éclectisme, bien que l’Amérique et le roman noir occupent la plus grande place dans son cœur et sa bibliographie. Et pourtant… À l’avenir, Simon Baril ne serait pas contre traduire moins de scènes de violence et plus de scènes d’amour..
Avec ce premier roman de Emily Ruskovich S. Baril doit avoir été comblé puisque violence il y a peu (si on excepte le fait qu’un enfant a été tué et un autre a disparu – toutefois les faits ne sont pas décrits, raconté en mode filtré). Le roman joue un peu avec le lecteur – on pense au début d’être dans une sorte de thriller à l’envers (apprendre pourquoi la mère a tué son enfant (que nenni – pas de réponse définitive). Un peu plus tard on pense être dans un roman sur la prison (on accompagne la mère tueuse – Jenny – dans sa vie en prison, sa vie avec ses codétenues) – ce n’est pas vraiment ça non plus. Et un peu de roman d’amour s’immisce également – alors content ?
Un autre « jeu » de l’auteur est de nous promener, un peu en parallèle à la mémoire détraquée de Wade, et en accompagnant Ann dans ses découvertes et son recollage par morceaux de moments du passé, le ballottant des années 73, 95 jusqu’en 2006 et même en août 2025 !…. Technique d’écriture qui permet de densifier un quasi-huis-clos situé dans une nature sauvage et un peu inhospitalière….
Se rajoute à la savante structure du roman le constat que Emily Ruskovich ne nous offre pas souvent les faits (réels), mais plutôt un faisceaux de sentiments qu’ils génèrent, nous transmet de bribes (et indices) de mémoire(s) dans une langue, il faut le souligner, poétique et de sensations, oui, sensations, puisque le lecteur arrive à « ressentir » ce que pensent/font/endurent/adorent les personnages.
Malgré la beauté des paysages, la bonté/beauté des personnages (sombres et/ou lumineux), la mélancolie sous-jacente, j’ai eu un peu de mal à m’attacher pleinement (notamment à Ann). Était-ce dû aux voyages erratiques dans le passé ? Le sujet du délitement d’une mémoire ? L’absence d’un axe narrative autre que la seule recherche (sans succès), la rencontre (pour moi beaucoup) trop tardive entre Jenny et Ann ….
Mais merci à A. et M.O. qui m’ont passé le livre dans le cadre de notre Club de Lecture – l’autrice sera dans mon viseur puisqu’il y a un vrai ton (qui rappelle par ailleurs avec sa petite musique les romans de Laura Kasischke) – que j’aimerai retrouver.
Je signale à toutes fins utiles que le roman a reçu le prix littéraire international IMPAC de Dublin. Ce prix est décerné chaque année en Irlande avec pour objectif de promouvoir l’excellence dans la littérature mondiale. C’est l’un des prix les plus généreux du monde littéraire. Créé en 1996 par le Conseil de la ville de Dublin, il récompense une œuvre de fiction publiée en anglais (langue originale ou traduction) au cours de l’année précédant la remise du prix. La première sélection est établie par des bibliothèques municipales de par le monde. Les finalistes sont départagés par un jury international. Le lauréat ou la lauréate de l’International IMPAC Dublin Literary Award reçoit une bourse de 100 000 euros.
Idaho a également reçu le prix de la traduction French-American Foundation 2019.
On est plusieurs à s’y être ennuyées !!
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Mais avec un ennui courtois ….merci d’être passée
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Ennui peut être, mais le titre est sympa.
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Je viens de réécouter un album du groupe Idaho (originaire de Californie comme leur nom ne l’indique pas), ce n’était pas formidable mais ça se laisse écouter. Comme ce livre se laisse lire peut-être… 😉
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eh ben, je ne connaissez pas – en effet, qqs notes écoutées sur Spotify m’incitent à signer ta remarque il y a peut-être un peu plus de ‘tension’ dans la lecture) . Dans ce cas précis (Idaho) la « playlist » est dans le titre, mais dans bon nombre de romans (notamment français) les auteurs/-trices nous livrent/proposent des playlists parfois étonnants….. (p.ex. le Goncourt Dubois, ‘La’ Dépentes …. et hier je tombe sur celle de Valentine Imhoff (roman noir – « Par les rafales » ) qui m’a incité de réécouter « Caravanserai » (Santana) ainsi que de vieux morceaux de de N. Cave et/ou Tom Waits…
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Elle a du goût cette Valentine. J’irai jeter une oreille sur ses écrits. 😉
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Quand j’aurai fini je publierai la playlist de son roman (« Par les rafales » – j’ai constaté qu’elle l’a mise en fin de bouquin (2 pages impressionnantes) ! Du goût elle en a, un peu métallique et de rouilles et des os….
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