Présentation de l’Éditeur (Grasset)
Jeanne est une femme formidable. Tout le monde l’aime, Jeanne.
Libraire, on l’apprécie parce qu’elle écoute et parle peu. Elle a peur de déranger la vie. Pudique, transparente, elle fait du bien aux autres sans rien exiger d’eux. A l’image de Matt, son mari, dont elle connaît chaque regard sans qu’il ne se soit jamais préoccupé du sien.
Jeanne bien élevée, polie par l’épreuve, qui demande pardon à tous et salue jusqu’aux réverbères. Jeanne, qui a passé ses jours à s’excuser est brusquement frappée par le mal. « Il y a quelque chose » , lui a dit le médecin en découvrant ses examens médicaux. Quelque chose. Pauvre mot. Stupéfaction. Et autour d’elle, tout se fane. Son mari, les autres, sa vie d’avant. En guerre contre ce qui la ronge, elle va prendre les armes. Jamais elle ne s’en serait crue capable. Elle était résignée, la voilà résistante. Jeanne ne murmure plus, ne sourit plus en écoutant les autres. Elle se dresse, gueule, griffe, se bat comme une furie. Elle s’éprend de liberté. Elle découvre l’urgence de vivre, l’insoumission, l’illégalité, le bonheur interdit, une ivresse qu’elle ne soupçonnait pas.
Avec Brigitte la flamboyante, Assia l’écorchée et l’étrange Mélody, trois amies d’affliction, Jeanne la rebelle va détruire le pavillon des cancéreux et élever une joyeuse citadelle.
Jusqu’au’jourd’hui je n’ai lu de Sorj Chaandon « que » « Retour à Killybegs » et « Le Quatrième mur » – et ce sont quelques bonnes critiques (mélangées à d’autres moins enthousiastes) de son dernier né – notamment celle de mon amie Simone qui m’ont donné envie de le lire.
Les 312 pages se lisent ultra-facilement. La simplicité des phrases – qu’on pouvait déjà observer dans ses précédents livres – y aide particulièrement – et rajoute parfois à la percussion émotionnelle.
« Dans le mot cancer, il y a de l’injustice. De la traîtrise. C’est le corps qui renonce. Qui cesse de vous défendre. C’est une écharde mortelle. Un visiteur du soir que l’on voit se faufiler en tremblant. Il dormait sur votre seuil, comme un vieux chat fourbu. S’est installé sur le canapé. Puis dans votre lit. Puis s’est senti chez lui partout dans la maison. C’est l’importun. Le nuisible. L’ennemi intérieur. Celui qu’on n’a pas vu venir. »
Pour moi il y a en fait deux livres en un. D’une part celui qui parle de la maladie de la narratrice (Jeanne Pardon qui va se transformer peu à peu en Jeanne Hervineau). Un récit dans lequel Jeanne, « qui est en guerre« , nous parle de ses ressentis, de sa lutte contre ce qu’elle appelle son « (bouton de) camélia »… « …un bouton rouge sang. Une fleur de décembre, le mois le plus éloigné du soleil. Voilà. Mon camélia. Mon hiver. Et aussi mes brumes, mes corbeaux sur la plaine, mes pluies infinies, mes brassées de chrysanthèmes à étouffer les morts. » (p. 24)
Le parcours de la combattante (la chimio, l’étrange comportement de son mari – Matt – …dans mon entourage les maris ne se comportent pas ainsi vis-à-vis de leurs femmes atteintes…. mais comment je réagirais-moi ? (question qui se pose lors de la lecture)) est décrit loin de tout larmoyant et nous rapproche de Jeanne…. Le deuxième livre/récit débute après la 1ere chimio avec la rencontre avec d’autres femmes malades : Brigitte, Assia et Melody – dont le lecteur apprendra progressivement distillée l’histoire personnelle.
Peu à peu le récit de la bataille contre cette maladie qui « vous » transforme est poussé au second plan et fait place à un « film » de braquage Place Vendôme dont le butin doit servir à la récupération (par Melody) de sa fille …. c’est bizarre on n’y croit pas vraiment et pourtant on se laisse emporter – le récit du braquage est par ailleurs bien réussi (genre « Les veuves » de Steve McQueen).
Malgré le mode désenchanteur, triste (« réaliste » – avec néanmoins un peu de lueur) de la fin de cette action « mise de piment et d’action dans la vie », le roman reste « léger ». Je regrette peut-être un peu que S. Chalandon ne nous offre pas une oeuvre « noir » comme celle des livres cités en haut, mais il y a une musique chaleureuse et sympathique, presque « feel good » qui fait tout passer, même le côté « schématique » du trio de femmes auquel se joindra Jeanne.
Enfin saluons cet auteur pour sa capacité d’avoir écouté (certainement ?!) beaucoup de femmes atteintes de cancer pour se mettre aussi aisément dans la peau de Jeanne.

le canard Gavroche….qui joue un rôle métaphorique dans ce roman
Merci, camarade. Je te conseille vivement Profession du père, autobiographique et sidérant. Et les autres…Et oui, réellement j’ai lu peu de choses aussi justes sur l’annonce du cancer et ce qui mute ensuite dans la personne atteinte, grièvement ou pas d’ailleurs. Je t’embrasse
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