Summer

Lu dans le cadre du Livre Inter 2018

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« La nature humaine est un putain de mystère. » (p. 265)

4e de couv’

Lors d’un pique-nique au bord du lac Léman, Summer, dix-neuf ans, disparaît. Elle laisse une dernière image  : celle d’une jeune fille blonde courant dans les fougères, short en jean, longues jambes nues. Disparue dans le vent, dans les arbres, dans l’eau. Ou ailleurs  ?
Vingt-cinq ans ont passé. Son frère cadet Benjamin est submergé par le souvenir. Summer surgit dans ses rêves, spectrale et gracieuse, et réveille les secrets d’une famille figée dans le silence et les apparences.
Comment vit-on avec les fantômes  ? Monica Sabolo a écrit un roman puissant, poétique, bouleversant.
C’est mon 1er roman de cette auteure (qui a déjà remporté des prix littéraire (Prix de Flore en 2013 ainsi que le GPSGL en 2016).

Je serai peut-être mieux, installé aux bords du Lac Léman (ou dans les Bains des Paquis)

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avec vue sur « Le jet d’eau semblait à portée de ma main, je voyais les détails de ses remous, l’eau qui retombe en écume soyeuse, comme de la mousse, du champagne ou une gigantesque giclée de sperme. » (p.17) pour parler de ce livre hypnotiquement morbide. Le lac étant un personnage à part entier dans cette narration.

Benjamin, membre d’une famille de bourgeois aisé (« il ne se passait jamais rien d’inconvénant… »!) (père avocat), et frère de Summer qui comme la 4e de couv’ l’annonce, se volatilisera (noyée, enlevée, enfuie ?) raconte. Non, il ne raconte pas, il essaie de se souvenir, de tisser le tapis de bribes d’images, de moments, sautant les années, en une longue quête intime….. Parfois c’est face à son thérapeute, parfois dans sa chambre  ou dans la nature, dehors, face au lac :

« …le lac, plus sombre chaque jour, ressemblait à une grande assiette d’eau sale. » (p. 128)

« Les filles, petits points noirs dans l’eau noire constellée d’éclats brillants, nageaient vers le rivage. De loin, elles semblaient prises dans de l’acier fondu. » (p. 98)

Bildergebnis für lac leman

La disparition de Summer a eu lieu il y a « vingt-quatre ans, neuf mois, …. » et elle pèse sur toute la vie, tout l’être de Benjamin, de tout son poids de mélancolie, de silence(s) (non, plutôt des non-dits ou non-compris). Des crises de panique inexpliquées l’assaillent, sa vie n’est que « noyade », il n’est que froideur, ses rencontres avec les filles sont un échec et le démolissent encore plus…

Le lecteur – surtout s’il a lu des romans de J. Carol Oates ou de Laura ­Kasischke (Suspicious River p.ex. ou White Bird in a Blizzard) – capte assez rapidement que les apparences, la façade de la famille toute comme il faut (ou dont on pourrait penser qu’elle est l’image même du bonheur), est/sera trompeuse. Et en effet, notamment dans le dernier tiers du roman on aura son lot de révélations…

La langue est parfois empreinte d’une belle poésie, toutefois je n’ai pas été aussi capté par les personnages (et finalement le récit en tant que telle) que j’aurai voulu. Les affres de l’adolescence (vive la névrose de Benjamin) ne m’a pas touché, les parents et le milieu décrit sonnaient clichéesque (prenons le nom de la famille : « Wassner » – Wasser = eau – ceux de l’eau…) et les « révélations » (ou twists) viennent dans « cette tragédie d’une famille illustre » un peu comme téléphonées (je me suis même dit à la fin : « tout ça (316 pages – écrites en gros) pour ça…? »)

Restant quelques phrases et descriptions qui sonnaient bien (mais que j’ai comme évoquée déjà lu/perçu chez JCO ou LK)…

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La Rade de Genève et le Mont-Blanc à l’aube de Ferdinand Hodler

Une phrase qui m’a fait rire  pour cause d’utilisation d’un adjectif surprenant :

« Elles passaient tendrement leurs doigts sur mes yeux, ou se transformaient en bête sauvage nocturne, leur langue glissant dans les lieux les plus extravagants de mon anatomie » (p. 209)…. C’est ou le lieu extravagant (fou, délirant, qui dévie par rapport aux normes reçues de la vie sociale, qui va contre la raison ???) ?

Le thérapeute : « il jouait avec son stylo-bille, en appuyant compulsivement sur le cliquet, et cela évoquait si fort la tristesse masculine et la masturbation que j’ai dû fermer les yeux. » (p. 231)

Une des phrases plus longues (pleines de couleurs miroir de l’âme de notre narrateur) :

« Je regarde A.A… sans le voir, et sous mes paupières défilent toutes ces années, les étés, les hivers, le soleil se lève et se couche sur le lac Léman en accéléré, en dessinant des grands arcs lumineux dans le ciel qui change de couleur à toute vitesse, des nuages filent comme des ombres, des plantes naissent, fleurissent, leurs couleurs explosent tels des milliers de cris, et aussitôt elles meurent en se recroquevillant, puis tombent en poussière, et je tombe en poussière avec elles. » (p. 263)

En fin de compte, j’ai eu un peu de mal à lâcher le livre, il y a vraiment qqchose d’hypnotique entre ces lignes et le va-et-vient entre les événements, avec un zeste d’effroi sourd et frémissant (tant le lac fourmille de fantômes, poissons et monstres sous sa surface grise d’acier…) mais qui ne m’a pas pris dans ses tenailles, contrairement à la promesse de la 4e de couv’ je n’étais pas bouleversé…(coeur de pierre qui roule !!!).

A propos lorenztradfin

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6 commentaires pour Summer

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  2. Je suis surprise que ce roman soit dans la sélection

    Aimé par 1 personne

    • lorenztradfin dit :

      Hah, vous n’êtes pas la seule personne (nous sommes une bande de lecteurs – une petite dizaine… nous avons crée un « Shadow Cabinet » pour « jouer au jury Inter » autour d’un barbecue et de bons vins…. Nous font circuler les livres et parlons bien entendu de nos ressentis….. AUCUN (!) de nous n’a compris cet Ovni dans la liste….

      Aimé par 1 personne

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