Lecture dans le cadre du jury du Prix Caillé 2017 – Le livre a reçu (en Autriche) les PRIX ADELBERT VON CHAMISSO et PRIX ANTON WILDGANS
Traduction de l’allemand (AUT) par Carole Fily (c’est sa troisième traduction)
Présentation de l’Editeur :
Pour son 750e anniversaire, la petite ville de Gigricht en Allemagne décide de favoriser l’intégration des étrangers : 5000 marks sont offerts à ceux qui auraient quelque chose d’intéressant à raconter. Rosa Masur, vieille Juive russe à qui on ne la fait pas et dotée d’un sens de l’humour à toute épreuve, se porte candidate. Elle a l’anecdote du siècle.
Un siècle qu’elle a vécu de bout en bout, avec ses révolutions, ses guerres mondiales, ses soubresauts. Petite Juive dans un village biélorusse où les pogroms ne sont jamais loin, jeune fille émancipée dans la Leningrad des années 20, ouvrière dans une usine textile, puis traductrice de l’allemand… Pendant l’interminable siège de la ville, mère de deux enfants, elle fait du bouillon avec la colle du papier peint, alors que ses voisins dévorent leur canari, ou pire; après la guerre elle doit batailler pour que son fils puisse étudier, l’antisémitisme étant entre-temps revenu à la mode.
Sorcières, apparatchiks, soldats, cannibales, passeurs, commères défilent dans une épopée menée tambour battant par une femme extraordinaire, drôle, intelligente, et qui n’a pas froid aux yeux. Même face à Staline.
Vladimir Vertlib écrit là un grand roman russe, énergique, fascinant, qui vous emporte à sa suite aussi sûrement que le cours de l’Histoire.
« Vladimir Vertlib n’a pas à craindre la comparaison avec Joseph Roth ou Isaac Singer, ni avec leurs personnages abîmés par la vie et torturés par leurs sentiments de culpabilité et leurs excès. L’œuvre, que le lecteur dévore d’un bout à l’autre avec passion, distille l’histoire européenne à l’époque de ses grands bouleversements. » Frankfurter Allgemeine
Quel bonheur – les Allemands ont eu telle mauvaise conscience après avoir massacrés tant de juifs, qu’ils autorisent maintenant quelques’uns d’immigrer de Russie vers l’Allemagne ….. Les Allemands retrouvent ainsi « leurs » juifs et ces Russes là commencent à avoir une meilleur vie.
C’est le fils de Rosa Masur, Kostik qui parle ainsi (j’ai résumé une tirade…)… et donne par là un peu le ton de ce livre qui par certains aspect n’est pas loin de Illska – Le Mal qui m’avait bouleversé en 2015. Rosa Masur, une femme qui a traversé le siècle et retrace « son siècle » à elle (et de son peuple) avec humour parfois, des larmes aussi…. Une femme forte, debout contre vents et marées….
Toutefois, Rosa m’a moins touché et/ou remué que « Illska » (sauf les 2 chapitres autour du siège de Leningrad… qui m’ont rappelé une phrase de mon père (rentré en 1953 (!) de captivité – dans l’Oural) : « L’homme peut être comme une bête. » (seule réponse à nos questions sur sa captivité…! (sic).
Ô grand Staline, Ô chef des peuples
Toi qui fais naître l’homme
Toi qui fécondes la terre
Toi qui rajeunis les siècles
Toi qui fais fleurir le printemps
Toi qui fais vibrer les cordes musicales
Toi splendeur de mon printemps
Soleil reflété par des milliers de cœurs.
Avec une myriade d’episodettes (comme des perles noires ou de petites histoires juifs se densifiant pour un grand conte philosophique) le lecteur est confronté – à travers les yeux de Rosa M. – avec l’histoire de la Russie (en générale) et l’histoire des juifs russes (en particulier)… ainsi qu’avec l’accueil des juifs (d’origine allemand ou pas – ahhh ce marché des faux papiers) en Allemagne…. Les souvenirs de Rosa comme miroir des événements historiques (avérés) vont au-delà de la simple anecdote et reflètent parfaitement la bêtise et cruauté humaine… non sans humour (souvent jaune) … dans des situations kafkaïennes.
– …..Ce sont les dérives de la transition, répondis-je. Nous bâtissons un monde nouveau, un monde meilleur. Cela ne se fait pas en un seul jour. Chez nous à Vitchi, j’ai vécu moi aussi des choses terribles, des pillages, des pogroms. Il y avait un commandant polonais, il s’appelait Radek Knofelewski. Ce Polonais…
– Un monde meilleur ?! m’interrompit Macha, et elle rit de nouveau si fort que le pauvre voisin tambourina du poing contre le mur. A chaque fois que les hommes veulent bâtir un monde meilleur, c’est-à-dire jouer à Dieu, c’est l’occasion de tirer des conclusions sur l’essence divine. Il serait peut-être plus judicieux de remplacer les croix et les icônes dans les églises par la représentation d’un fou en camisole de force. Cela collerait bien avec notre époque. Même si, bien sûr, le Crucifié n’est pas un mauvais symbole – un criminel qui se fait exécuter.
J’imaginais les fidèles en train de réciter « Notre père qui êtes aux cieux », inclinés devant la photographie d’un homme en camisole de force attaché à son lit. » (p. 163)
Last but not least – avant de laisser la parole à la traductrice – Le personnage Rosa Masur est devenue traductrice (et c’est autour d’un travail de révision de traduction se nouera un drame qui lui sera dénoué – en présence de Staline – grâce à un jeu de mot … vive la différence entre « dormir avec qqn » et « coucher avec qqn » !
Entretien avec Carole Fily (traductrice)
http://www.lapetiterevue.fr/infos-5/is7qgvjm218/Rencontre-avec-Carole-Fily
Très intéressant
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Et très éclairant sur ce qu’est la traduction littéraire; cette façon de lire à voix haute…Vraiment intéressant cet entretien
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Je ne peux/veux pas parler ici de la qualité de la traduction – nous sommes en train de lire la dernière sélection… mais cet(-te) interview/rencontre dis bcp sur le travail réalisé…et montre bien la difficulté (pas toujours « au carré » comme elle dit… Et quant à la lecture à voix haute… un « must » pour se rendre compte si ça passe ou pas… (j’en fais chaque fois comme dernière « évaluation » – si l’agenda le permet…. Merci de ton commentaire !
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