Dans le cadre de mon action pour le « soutien au cinéma français », vu deux films « A l’ombre des femmes » de P. Garrel et « Trois souvenirs de jeunesse » de A.
Desplechin. « A l’ombre des femmes » de P. Garrel (avec Stanislas Merhar, la princesse Clotilde Courau et une quasi inconnue venant du théâtre : Lena Paugam) Une nouvelle fois dans la longue filmographie de Garrel, après « La jalousie » (que j’avais aimé : ) un film en N&B d’une beauté diamentaire, d’une concision et acuité exceptionnelle – 1h10 ! ), plein d’ellipses, centré sur les moments clés de l’histoire d’un couple (en crise « banale » comme dirait l’autre).
Un homme (il réalise des documentaires) vit avec une femme (elle est son assistante – et trouve qu’il n’y a rien de plus beau que de travailler avec l’homme qu’on aime – une idée que je ne partage pas du tout). Ils vivent chichement – à la bohémienne et donc pas « bourgeoisement » – elle affiche une joie de vivre et un amour pour lui rayonnant – ah ces sourire de Clotilde Courau…. –
Lui, genre beau blond ténébreux incapable de montrer ses sentiments (ce qui a suscité des réactions quasi unanimes (sauf 1 F) dans notre groupe – nous étions 6 (3 H & 3 F) à regarder ce film : … Quel goujat ! Incapable de vivre, de la VOIR elle…. [tout le monde pensait au cri d’elle : « mais pourquoi je ne sens pas que tu m’aimes..??!! »
[ «Les hommes silencieux, ça met mal à l’aise. On les croit forcément génies ou abrutis, »] (Leo Carax)
Lui donc va rencontrer une autre femme (Elisabeth, brune, d’une sensualité quasi animale, c’est moi qui le dit), elle va devenir sa maîtresse (aux heures et envies dictées par lui seul). Cette fille, très amoureuse et acceptant parfois avec peine les goujateries blessantes de Môssieur, va apercevoir à deux reprises que la légitime de Môssieur a elle de son côté une liaison avec un (autre) homme. Après des hésitations elle va le confesser, crise du beau blond ténébreux qui ne supporte pas….. s’ensuit après quelques temps d’essais de rafistolage (perte de confiance en et surveillance de Mme., des répliques blessés du genre….après l’amour : « c’est comme ça que tu as fait l’amour avec lui? »….séparation – et finalement retrouvailles (in extremis après un an)… Peu et beaucoup dans un somptueux N&B, des acteurs convaincants (Garrel : Le N&B permet aussi de faire tourner les comédiens sans maquillage. »
Film d’une justesse d’observatrice méticuleuse des cordes de l’âme touchées par la grâce et le désespoir et/ou de l’inconstance…. J’ai beaucoup aimé cette petite épure sur un triangle amoureux (banal – et si souvent traité) qui démontre le crédo du metteur en scène que la libido d’une femme est aussi puissante que la libido masculine, et que nous, les Hommes n’avons qu’à nous tenir comme il faut.
J’ai moins bien aimé « Les trois souvenirs de jeunesse » de A. Desplechin.
Paul Dédalus va quitter le Tadjikistan. Il se souvient… De son enfance à Roubaix… Des crises de folie de sa mère… Du lien qui l’unissait à son frère Ivan, enfant pieux et violent…Il se souvient… De ses seize ans… De son père, veuf inconsolable… De ce voyage en URSS où une mission clandestine l’avait conduit à offrir sa propre identité à un jeune homme russe… Il se souvient de ses dix-neuf ans, de sa sœur Delphine, de son cousin Bob, des soirées d’alors avec Pénélope, Mehdi et Kovalki, l’ami qui devait le trahir… De ses études à Paris, de sa rencontre avec le docteur Behanzin, de sa vocation naissante pour l’anthropologie… Et surtout, Paul se souvient d’Esther. Elle fut le cœur de sa vie. Doucement, « un cœur fanatique ». (synopsis de allocine)
Si « A l’ombre des femmes » est une short-story de Carver ou minimaliste à la Hemingway, l’opus de Desplechin est un roman fleuve, une œuvre quasi littéraire et proustienne. C’est A.L. qui nous en avait fait des éloges, les critiques ne sont pas en reste non plus (tout le monde parle d’un film « sublime ») et on lui fait confiance.
Si la mise en scène et la narration (trois parties de durée inégale – une partie quasi abstraite sur la folie de la mère, une deuxième picaresque avec un voyage d’étude de classe en Russie, ou le héros (Dedalus – dédale) va laisser son passeport à des opposants ou régime, et une troisième partie – quasiment 2/3 du film sur l’histoire d’amour entre Dedalus et une jeune fille…. grevé par la distance géographique ente les deux – lui en étude à Paris, elle à Roubaix…) sont d’une indéniable qualité (parfois époustouflant : cette maîtrise de passer du présent au passé, d’évoquer des sentiments, de re-voir/re-lire/ré-écrire un passé est vraiment admirable), mais je suis resté en dehors, trop d’intellectualisation, trop « écrit » et littéraire et finalement trop longue aussi.
J’ai apprécié particulièrement le début et notamment la fin du film (une confrontation entre le « héros » et un ami d’enfance qui éclaire une grande partie du récit. Cet ex-ami, le « traître » qui a tout tenté pour le séparer de son premier amour, nous montre le feu, la passion (encore) en lui , en une fraction de seconde de colère déchaînée (aussi bien contre cet homme qui – comme sa femme présente – ne sait pas comment le prendre que contre lui-même qui n’a jamais cessé de revenir à ces épisodes).
Autre point de difficulté d’adhérer : je n’étais pas convaincue de l’histoire d’amour (à distance) des deux tourteraux. Lou Roy-Lecollinet et Quentin Dolmaire
Toutefois, je ne me suis pas ennuyé, les 2 heures passaient vite en compagnie des acteurs fort convaincants et frais.
A re-voir, pour peut-être trouver quelques « clés » : « Comment je me suis disputé – Ma vie sexuelle » ….vu en « complément » le soir même « Rois et Reine » qui traite pas mal des sujets évoqués de ce nouvel opus.