Livre Inter – L’Ecrivain National

Livre N° 4 de la liste pour le Prix Livre Inter :

Encore un roman d’un auteur duquel je n’ai encore rien lu….

Serge Joncour « L’Ecrivain National ».

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Un livre que je n’avais à priori pas trop envie de lire – trop de tapage médiatique –  et qui finalement s’avère être pas mal du tout.

Un écrivain  qui se remet difficilement d’un divorce est invité à passer quelques semaines en résidence dans un village du Morvan (invité par les libraires du village, logé à l’hôtel en contrepartie de l’organisation d’ateliers d’écritures, des lectures et rencontres avec des lecteurs, présence à qqs raout organisés par la mairie…). Ce qui devrait être une sorte de villégiature (« 4 semaines de tranquillité« ) va se transformer en quelque chose pas loin du cauchemar adouci (et/ou dynamisé) par une histoire d’amour – un coup de foudre au premier regard!

« Tomber amoureux, c’est voir l’autre comme un mystère dont on ne supporte pas d’être exclu, c’est redouter de ne pas l’atteindre,  ne plus pense qu’à une chose : le revoir, le côtoyer. Plus je me disais que cette fille était un danger et plus elle en devenait désirable ». P 296

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C’est que l’écrivain (au nom de Serge – tiens!) va prendre connaissance d’un fait divers (affaire criminelle?!) dans lequel est mêlé une femme dont les yeux le happent littéralement …. Il va tout mettre en oeuvre pour a) la voir/rencontrer/connaître  b) et se muer en une sorte d’enquêteur pour savoir davantage sur l’affaire et ses ramifications dans le petit cosmos chabrolien de la petite ville…… L’ennui, la solitude et un peu de désœuvrement aussi dans ce coin paumé de la France y est certainement pour quelque chose….

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Le voilà donc parti dans son « délire » : « La réalité dépasse souvent la fiction, le problème c’est qu’elle est bien moins bavarde, bien plus dissimulée« . (p.56) ….. » Déjà j’envisageais les différentes hypothèses, un homicide, une simple disparition, un accident camouflé, à moins que ces deux jeunes n’aient vraiment appartenu au milieu, ou qu’ils aient été piégés par une sorte de mafia de l’Est. De nouveau je m’arrêtais sur les photos, j’essayais de supposer le déroulement des événements, de ressentir un peu l’effroyable séquence, j’imaginais ces mêmes visages paisibles et doux, défigurés par la violence ou la panique. » (p.62)

Et ça part en toute vitesse, l’écrivain respecte à peine les contraintes de ses rendez-vous « officiels », empruntant la voiture de ses hôtes pour aller à la pêche d’informations sur le fait divers, s’aventure dans la/les forêts (belles descriptions des paysages forestiers) .(« ….Perdu dans un océan végétal d’où ne montait pas le moindre chant d’oiseaux , rien d’autre que des craquements disparates, le tout baigné dans une pénombre où infusait déjà la nuit…..)  et voilou que Joncourt mélange joyeusement – et d’une fluidité réjouissante – les genres : roman photo/d’amour/sensualité, un peu de thriller, un zeste de suspense, une pincée d’écologie et réflexion sur ville/campagne et finalement auto-fiction ironique et gentiment moqueuse (pas mal les descriptions des rencontres avec des lecteurs et des cocktails avec les « sommités » de villages/petites villes sentent le vécu….) « …Tous les visages restaient braqués sur moi, ils me scrutaient de leur moue dubitative. Pas de doute que c’était la force de conviction des deux libraires qui avait réussi à drainer tous ces lecteurs, ils avaient dû les tarabuster depuis des semaines, leur clientèle comme leur connaissances qui s’étaient donc sentis obligés de venir. Pas tant pour moi que pour honorer l’opiniâtreté de ces deux acharnés….. » (p.81)

La scène « charnelle » de l’Ecrivain National avec sa belle et mystérieuse Dora est forte (bien réussie dans son genre) :  (p. 337 – 340 – rougissant je n’ose pas citer….) comme l’était celle du « baiser » p. 247 (« ….alors je pris sa bouche et l’embrassai, l’éblouissement total. Prendre une bouche, c’est quitter le monde par l’issue la plus haute, c’est se soustraire à cette réalité qui tout autour de soi sombre dans le commun, embrasser une bouche, c’es plonger dans ce vertige sublime dont on ne sait pas s’il nous emporte pour une seconde ou pour une vie, embrasser une bouche pour la première fois, c’est reléguer le réel au second plan…… »)

Serge Joncour a obtenu le Prix des deux magots (avec huit voix contre deux à Olivier Rolin (« Le météorologue« ) – que je vais lire comme prochain livre de la liste  – et deux à Nelly Kaprièlian (« Le manteau de Greta Garbo« ).

Un vrai coup de cœur pour sa légerté et le plaisir qu’il procure (on a du mal à lâcher le livre) – je vas certainement lire un autre livre de cet auteur pour confirmer/infirmer cette appréciation positive. Je pense un sérieux prétendant au Prix du Livre Inter.

Encore un exemple de son style « malin » :

« Mon style aussi la gênait. Fait de phrases courtes. Beaucoup trop. Elle aimait se perdre dans les méandres d’une phrase longue, quitte à devoir revenir au début pour bien juger des détours et intimement s’imprégner du verbe, chaque nouvelle ligne devenant le petit précipice du haut duquel on pouvait oublier le sens même de ce qu’on venait de lire, là était son plaisir, dans ce minuscule vertige, cette peur infime que tout s’effondre au point de devoir tenir la phrase comme une profonde inspiration. » (p. 175)

A propos lorenztradfin

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7 commentaires pour Livre Inter – L’Ecrivain National

  1. Laure Micmelo dit :

    Ce livre m’attend dans un coin, mais je trouve toujours une raison pour en lire un autre avant celui-ci, moi aussi la motivation me manquait, mais maintenant, elle est revenue !

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    • lorenztradfin dit :

      …. si nous ne lisions pas les 10 livre de la liste du Livre Inter ….je n’aurais pas touché…. Je rentre de l’apéro de notre équipée au marché – et d’autres pensent comme moi, sympa, léger, page-turner…

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  2. Il fait partie de mon comité de sélection. Au vu de la remarque de Laure, j m’en vais de ce pas lui proposer une LC dessus : cela me motivera aussi ! Bises

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