Les écrans de nos nuits blanches …
C’est drôle comme le passage de quelques jours puisse influer sur la perception d’un film : voir comme il y a des images qui résistent, impregnent la rétine, d’autres qui s’évanouissent, se perdant dans les tréfonds de l’oubli.
« Moebius » de Eric Rochant fait partie des derniers.
Petit film qui se veut grand et permet de passer une demie soirée en compagnie de J. Dujardin et C. de France – deux acteurs qui d’emblée empêchent de croire aux personnages (même si Dijardin réussit plutôt bien sa sortie de l’ombre de « BriceOSS ») – Toutefois, ces 1h40 passées en leur compagnie tragico-amoureuse ne nous procure pas bcp. d’instants hitchcockiens (pourtant promis par l’affiche…) et nous offre plutôt des secousses de rires (ahhh, ces scènes d’amour soit-disant sensuelles, ahh cette recherche du « bras qui protège… » – « quand tu pars laisse moi ton bras…! » lui souffle-t-elle à l’oreille… j’en frissonne encore) ».
Scénario alambiqué ou chacun cache sa vrai identité à l’autre (toutefois plutôt sympa de nous laisser dans le brouillard pendant un bon quart d’heure), scénario qui lorgne sur le cinoche américain mais n’y arrive qu’à son genou…toutefois il nous offre LE twist scénaristique qu’on connait de chez Hollywood….et une fin « happy end » invraisemblable.
Alors vraiment, film de dimanche soir à la TV, comme un vin doux (un petit Rivesaltes p.ex.) mais ouvert depuis deux mois, ou comme la lecture d’une BD qui ne marquera jamais le paysage bédé….Le film s’est évaporé.
Toute autrement le lendemain, au soir, après une belle rando, sortie leçon cinéma avec les copains: « Lincoln » de Steven Spielberg.
Pour le dire d’emblée, je n’avais pas envie de voir le film (j’avais peur d’assiter à une hagiographie et de débats parlamentaires à n’en plus finir)… par ailleurs, depuis « Munich » je n’ai plus vu de film de lui….que nenni…
Le film est (un chouia trop) long, mais il arrive à nous captiver avec un sujet difficile, la naissance d’un amendement de la Constitution des USA (le 13e – « Ni esclavage ni servitude involontaire, si ce n’est en punition d’un crime dont le coupable aura été dûment convaincu, n’existeront aux États-Unis ni dans aucun des lieux soumis à leur juridiction. »
Ce sont les derniers mois de la vie de Lincoln, les derniers mois de la guerre de sécession, qu’on nous montre. Pas de flash-backs pour retracer des moments passés, Spielberg (et Kushner, son scénariste) nous jettent au milieu d’un maelstrom historique.
Avalanches de dialogues/monologues qui risquent au début de nous perdre (tant de noms de sénateurs, villes, Etats dont nous (je) ne sommes (suis) pas familier(s)), manigances, tricheries politiciennes, avec des effets de manche qu’on croyait inventés par les temps modernes….
Mais non, tout se met en place, doucement, bien construit, pédagiogique, sans être lourd ….et de la guerre nous voyons peu (au total deux, trois scènes)
Lincoln est interpreté par l’immense acteur Daniel Day-Lewis (couronné pour ce rôle par l’oscar 2013) – faut le voir, irradiant l’écran, un vrai génie….(presque méconnaissable si on se souvient de lui dans « There will be blood » ou autres « My beautiful laundrette »).
Tommy Lee Jones joue le Sénateur Stevens http://www.masonicinfo.com/thaddeus.htm, qui nous réserve une belle surprise à la fin du film (belle performance de T. Kushner, le scénariste, qui arrive à lier, fortement documentée, la Grande Histoire et l’exploration de l’Intime, des ombres, de ce qu’il faut « inventer » )
Un bon film qui laisse de belles images (Lincoln sur une chaise dans la pluie, discutant avec des soldats, les clairs obscurs dans la Maison Blanche (filmée comme une tannière), les sourires et tristesses de Lincoln…).
J’irai voir dans mon ciné d’art et d’essai préféré le Lincoln mais pas Mobius : c’est comme cela ! et votre article ne fait que confirmer mon souhait.
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Quelle chance pour moi de ne pas porter tout seul la responsabilité….(if ever) …Bonne toile!
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