La lecture a débuté un peu avant Berlin, je l’ai poursuivi au cours d’une (courte) semaine (chargée) de traductions plutôt ardues….dans le train vers Paris j’ai fini le « vieux » roman de R.J. Ellory – il date de 2007 : « A quiet belief in angels – Seul le silence » (bien traduit par Fabrice Pointeau).
Je ne dirais pas qu’il est « magnifique » et qu’il me « hantera longtemps » (1ère de couverture un peu tape-à-l’oeil – de Michael Connelly dixit) – mais je dois dire que les 602 pages de la version poche – se lisent bien…malgré quelques longueurs.
Structure narrative en flash back….de Joseph Vaughan qui avait 12 ans quand, dans son village au fin fonds des States, débutait une série de meurtres de jeunes filles (de 7 – 12 ans) qui va jeter une ombre sur toute sa vie (ou le hanter) puisque le livre est placé non seulement sous l’exergue de C. Ozick: « Ce que nous nous rappelons de notre enfance, nous nous le rappelons pour toujours – fantômes permanents, estampés, écrits, imprimés, éternellement vus »…mais aussi, bcp plus lourde encore de Truman Capote.
Ainsi le roman est teinté noir-noir, mélancolique, placé sous le signe de la culpabilité. Ce qui le rend « différent » c’est qu’en même temps la structure en flash back nous permet de vivre, un peu par l’intérieur, la vie d’un village américain (Augusta Falls) entre les années 30 et 50 (pas gai du tout). Par ailleurs, le livre offre également des reflexions sur l’écriture, sur les possibilités qu’offrent les mots pour nous libérer et/ sauver, sur le(s) besoins d’écrire pour vivre (J. Vaughan devient un auteur, et nous assistons à la naissance de sa sensibilité, son/ses livres, un peu la naissance du livre dans le livre… – )
Toutefois, les souffrances de l’héro me semblaient parfois un peu étirées, redondantes…pas toujours prenantes. L’intrigue en tant que telle était pour moi éventée dès le milieu du livre – en contrepartie il y avait des coups de « théâtre » digne d’un film hollywoodien – pour me faire dire finalement qu’on peut faire de la littérature bien écrite dans le monde des thrillers.
Voici une remarque critique que je partage:
Ce roman, excellent, est mal « encadré ». Par une citation de Truman Capote en exergue, et par un résumé qui, inévitablement, fait penser qu’on a là un roman de serial killer de plus. Or, pour commencer par la fin (et le plus facile), si l’on a effectivement un serial killer dans le roman, le sujet est ailleurs. Pas de traque ici, pas, ou peu de suspense à la Connelly (sauf, un peu à la fin). Le propos est autre. Ellory a écrit un roman très noir sur la culpabilité, les traumatismes et l’imaginaire de l’enfance, mais également sur la difficulté d’être différent dans une petite ville, sur le déracinement … De très nombreuses thématiques, traitées avec finesse et beaucoup d’empathie, qui donnent une tonalité à la fois sombre et émouvante à ce beau roman noir. Pour ce qui est de Truman Capote, s’il est un roman auquel celui-ci ne ressemble absolument pas, c’est bien à De sang froid ! Capote écrit un roman implacable, d’une noirceur glaçante, sans la trace d’une « prise de position », sans s’impliquer en tant que narrateur, en observant tout (bourreaux et victimes) d’une position totalement externe. Ellory, au contraire, nous plonge en plein cœur du drame, dans la tête d’un personnage qui lui, se sent, à tord ou à raison, totalement impliqué. Ce qui n’enlève rien, ni à Capote (!) ni à Ellory. Ce sont juste deux grands romans, aussi différents que l’on peut l’être à partir d’un sujet en apparence semblable. Voir en ligne : http://actu-du-noir.over-blog.com/
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